Discussion privé entre deux membres des Incunables Oubliés

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Ezechiel
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Discussion privé entre deux membres des Incunables Oubliés

Message par Ezechiel »

Dans un salon cossu de l’hôtel particulier sur l’île Saint-Louis, à l’occasion d’une réunion informelle entre membres du Club des Incunables Oubliés.

Deux hommes dans un coin de la pièce examinent les superbes in-quarto relié pleine peau de la collection privée de Mr de Brillant, leur hôte pour la soirée.

« Selon le catalogue, la collection de Brillant abriterait une des dix copies des Très Riches Heures du Comte de Berry. Pensez-vous, que notre hôte aura la bienveillance de nous le montrer ?

- Assurément, Mr de Brillant ne nous aurait pas ouvert les portes de son hôtel particulier sans avoir penser à assouvir notre curiosité à tous.

- Cette une pièce rarissime. J’avoue que j’envie Mr de Brillant. Si je suis bien informé, il y a toujours eux dans la famille de notre hôte un virus bibliophile qui a fait qu’à chaque génération, un membre de la famille se prend pour la passion des livres. D’où cette superbe collection et ces pièces exceptionnelles.

- Absolument. Avez-vous vu la bibliothèque de Trinity College à Oxford ? Etonnante, et les étudiants y ont librement accès pour leur études. Imaginez pouvoir étudier avec des livres de droit du 18e siècles, ou la médecine selon Paracelse. Peut-être les idées ne sont plus à jour, mais quelle plongé dans le passé !

- C’est vrai qu’à notre époque dominée par l’informatique, beaucoup de gens néglige les sources mêmes du savoir que sont les livres. Il y a des documents qu’il est impossible de trouver sur internet et si personne n’y prend garde, des pièces peuvent sombrer dans l’oubli et un pan de savoir disparaître de la conscience humaine. Par exemple la Semaine des Huit Nuits Fantastiques...

- Mmmhh... attendez, il me semble en avoir entendu parlé durant mes études... C’est un récit anonyme décrivant le Carnaval de Venise? Je crois que jugé trop licencieux, il aurait été mis à l’index par l’Eglise.

- Pas mal. Presque cela. L’auteur est en effet anonyme, et cet ouvrage raconte un carnaval de Venise vu par un mystérieux visiteur qui découvre, nuit après nuit la grandeur et la décadence de cette fête. Et plus les nuits avancent, plus il assiste à des scènes baroques ou toute pudeur et retenue sont oubliées. Il a été effectivement condamné par l’Eglise et tous les exemplaires ont disparu dans un autodafé.

- Encore un objet de légende.

- Presque. Selon mes sources, un exemplaire aurait survécu. Un seul. Certains disent qu’il s’agirait de l’original, mais cela n’a guère d’importance puisqu’il s’agit du seul rescapé. Vous ai-je dit que j’avais une première édition du Decameron de Boccaccio ? Et un exemplaire annoté de la main même de l’auteur de « Faust » ? et quelques autres spécimens uniques du même acabit.

- La Semaine des Huit Nuits Fantastiques pourraient parfaitement allé dans votre collection de chef-d’œuvres décrivant les relations ambiguës de l’homme avec ses passions et ses démons.

- Effectivement, j’avoue être prêt à donner cher pour mettre la main sur cette ouvrage, mais mes offres n’ont pas rencontré la réponse que j’escomptais.

- Ainsi donc, vous avez la certitude qu’un exemplaire aurait survécu ? Et vous connaîtriez son actuel possesseur ?

- Malheureusement, dois-je dire. Celai rend d’autant plus regrettable ce manque dans ma collection.

Un moment de silence s’installe entre les deux hommes qui semblent perdus dans la contemplation des ouvrages alignés devant eux.

- J’ai ouï-dire que vous étiez un homme de ressources. Plusieurs de mes amis m’ont vanté votre expertise consommé et vos capacités à trouver les objets les plus rares.

- Continuez...

- Bien que théoriquement inestimable puisque unique, je pense que la Semaine des Huits Nuits Fantastiques n’a de valeur qu’aux yeux d’un véritable amateur, comme moi. Cet amateur serait sans doute disposé à payer un demi-million d’Euro pour un tel ouvrage.

- Peut-être même jusqu’à 800'000 Euro vu la qualité exceptionnelle de l’ouvrage...

Autre pause...

- Effectivement, considérant les efforts requis, les complications possibles liés à la préservation de l’ouvrage... c’est un prix tout à fait raisonnable.

- Dans ces conditions, il est évident qu’un amateur aussi passionné et prêt à autant de sacrifice, mérite de voir sa ténacité récompensée.

- Je vois que nous sommes d’accord. Le possesseur de l’actuel ouvrage est la fondation Balkan, située à Bordeaux, où s’expose leur collection dont la Semaine des Huit Nuits fait partie.

- Parfait Mr Emillion, je vous tiendrai informé et je vais voir si je suis capable de convaincre la fondation Balkan de cédé cette ouvrage. Je suis convaincu de pouvoir me montrer plus persuasif que vous et que l’ouvrage trouvera son possesseur légitime dans peu de temps.

- Merci Mr Armès, je vois que nous nous comprenons. Voici ma carte avec mes coordonnées. Je vais partir en voyage d’affaires quelques semaines, pour ne pas interférer avec vos « négociations ». Vous serez capable de joindre ma secrétaire au heure de bureau qui transmettra ou vous mettra en contact avec moi.

A ce moment-là, une clochette sonne annonçant le début du repas. Après une poignée de main ferme, les deux hommes se dirigent vers la salle à banquet, en devisant sur les mérites des moines copistes et enlumineurs du 13e siècle.
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