Prompt-o-maton

Les trucs qu'on a rien à voir avec la neige
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atlantisdesetoiles
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Prompt-o-maton

Message par atlantisdesetoiles »

Bon, comme certains le savent déjà, l'ont deviné, ou pas, j'écris...beaucoup et j'aime bien les défis.
C'est pourquoi je crée ce post, pour que vous me proposiez des prompts d'écriture.
Prompt kesako?
Un concept ou une idée de base autour du quel articuler un récit.
Exemple: Réconciliation sur l'oreiller, une rancune vieille de l'enfance revient hanter le personnage, ou dans un autre genre Cthulu à le hoquet.
Si d'autre écrivains/scénaristes veulent se joindre à moi, qu'ils n'hésitent pas.
Voilà, s'il vous plaît, donnez à mes petites cellules grises de quoi travailler!
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Darano
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Re: Prompt-o-maton

Message par Darano »

J'aime bien ton idée et je la trouve très bien.
"Tout le monde tient le beau pour le beau,
c'est en cela que réside sa laideur.
Tout le monde tient le bien pour le bien,
c'est en cela que réside son mal."

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atlantisdesetoiles
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Re: Prompt-o-maton

Message par atlantisdesetoiles »

Merci, un prompt à proposer ?
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Darano
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Re: Prompt-o-maton

Message par Darano »

Un berger gardant un troupeau étrange.
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atlantisdesetoiles
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Re: Prompt-o-maton

Message par atlantisdesetoiles »

Et voici le premier Prompt. Vos remarques et critiques sont les bienvenues, ainsi que tout nouveau prompt.

Un berger gardant un troupeau étrange.

Sous le soleil encore jeune et pourtant déjà écrasant, le petit pâtre veillait déjà sur son précieux troupeau, pour le moment encore protégé des rayons brûlants par les pierres ocres de la gigantesque porte du grand temple. Depuis les innombrables corniches, d'antiques dieux sculptés observaient les premiers pèlerins passer devant l'enfant presque sans le voir, tout occupés à s'attirer leur bienveillance.
L'enfant pourtant, insensible à leur regard immuable, veillait soigneusement sur son cheptel, s'assurant méticuleusement que chacun ait sa place, qu'aucun ne soit bousculé ou poussé dans un coin par son voisin et que le soleil ne cuise pas leur cuir, au risque de le voir fendiller. Sa pitance en dépendait. Qu'un de ses protégés soit abîmé ou manquant et il lui en coûterait. Non seulement la poignée de piécettes qui lui permettraient de faire son unique repas quotidien lui serait enlevée, mais en plus, il en serait quitte dans le meilleur des cas pour quelques coups de bâtons, pour peu que la maréchaussée ne s'en mêle pas.

Avisant un groupe de gamins efflanqués, courant pieds nus dans la poussière, le brave berger attrapa son bâton et s'avança, prêt à protéger son troupeau des petits mendiants prêts à tout pour une bouchée de pain ou un bout de tissu. Bien lui en prit, car tels une nuée de moineaux, ils fondirent sur lui, tentant de le déborder par leur nombre pour le voler, en vain. Faisant tournoyer la solide branche de manguier, il les frappa encore et encore, éclatant une lèvre, blessant un poignet, jusqu'à ce qu'avec moult piaillements et menaces, les enfants battent en retraite, préférant aller s'attaquer à d'innocents touristes matinaux.

Avec un soupir de soulagement, il compta ses ouailles, s'assurant qu'aucune ne manquait à l'appel. Elles étaient toutes là, indemnes, à peines égaillées par la violence de la lutte.
Satisfait, il entreprit de les regrouper, resserrant leurs rangs dans l'ombre de plus en plus maigre de la grande porte, s'approchant autant que possible du vaste mur d'enceinte sans en courroucer le vieux prêtre gardien, qui ne le tolérait qu'à une certaine distance.

Le temps de siffloter une petite rengaine populaire, assis sur ses talons, et dans un grand crissement de pneus, le travail vint à lui sous la forme d'un premier bus emplis de touristes.

Se relevant d'un bond, il accrocha son plus beau sourire à ses lèvres et s'avança.
« Welcome in Meenakshi temple, misses and misters ! Ten rupees and your shoes will be safe ! Safe shoes ! Ten rupees ! Safe shoes ! »
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Re: Prompt-o-maton

Message par Darano »

Trés joli
"Tout le monde tient le beau pour le beau,
c'est en cela que réside sa laideur.
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Re: Prompt-o-maton

Message par atlantisdesetoiles »

Merci beaucoup.
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Re: Prompt-o-maton

Message par Khazou »

Un petit prompt pour toi :

L'innommable frappe à la porte
Le Forge-Mondes est ici. Le Forge-Sites est en dessous.
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Dr Nemrod
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Re: Prompt-o-maton

Message par Dr Nemrod »

Ha, c'est génial le troupeau étrange. Belle surprise à la fin du texte :)
---------------------------------
God has a plan to kill us all
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atlantisdesetoiles
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Re: Prompt-o-maton

Message par atlantisdesetoiles »

Un peu plus long, mais voici le suivant, que je me suis beaucoup amusée à écrire et ai dû patienter quatre longs jours pour qu'il soit relu et que je puisse le poster. ^^'

L'innommable frappe à la porte

Schaali, le prix de meilleur élève de la classe serré contre lui, se hâtait de rentrer à la maison.
Il était encore tôt, et il aurait préféré rester jouer un peu avec ses amis, mais depuis des semaines maintenant, les disparitions se multipliaient dans la région, tout comme les rumeurs de mystérieux monstres rôdant alentour, et depuis qu'un enfant de son école avait disparu, la paranoïa atteignait son paroxysme dans le quartier.
Depuis, la plupart de ses petits camarades étaient escortés par leurs parents après les cours, mais Schaali lui, rentrait toujours tout seul. Être élevé par un père célibataire et très occupé avait de nombreux avantages en temps normal, mais pas vraiment en cet instant. Malgré sa façade de détachement soigneusement étudiée, une fois bien en sécurité dans sa chambre obscure, Schaali s'autorisa un long soupir de soulagement.
Ragaillardi, il remarqua enfin les gargouillis de son estomac, et se mit en quête de quelque chose à manger. Un petit mot l'attendait sur la table à manger, coincé sous une assiette pleine de viande séchée.
« Je dois faire des heures supplémentaires. Ne m'attend pas pour aller dormir et régale-toi bien. »
Modérément déçu par ce abandon somme toute habituel, Schaali attrapa un copeau de viande, l'enfourna, suivi de peu par deux ou trois autres, puis emportant le plat à l'étage, repartit s'enfermer dans sa chambre. Lui qui se réjouissait de montrer son prix à son géniteur, allait devoir attendre le lendemain... au plus tôt.

Il avait dû s'assoupir en faisant ses devoirs, car lorsqu'il ouvrit les yeux, il faisait grand jour, et il n'y voyait quasiment rien.
Avec un gémissement pitoyable, il partit à tâtons à la recherche du mécanisme du store, qu'il finit par trouver.
Le battant descendit dans un grincement d'enfer, et Schaali put enfin y voir à peu près clair, malgré la lumière qui entrait encore à flots par la porte de sa chambre.
Schaali eut un étrange pressentiment, et jeta un œil à son réveil.
Ils étaient bien en plein après-midi et pourtant, son père n'était toujours pas rentré. Sinon, les stores du reste de la maison seraient baissés.
L'inquiétude l’étreignit, et bien plus effrayé par la lumière maintenant qu'il savait qu'il était toujours tout seul à la maison, il s'empara de sa couverture, s'abritant sous son ombre rassurante avant de s'avancer dans le long couloir blanc de lumière.
Marchant aussi vite que possible, Schaali fonça jusqu'à la première fenêtre et en ferma bruyamment le store, avant de foncer vers la seconde, puis celle d'après.
Son travail fini, il soupira, relâchant un peu sa prise sur la couverture, pour bien vite la raffermir alors qu'un grincement sinistre résonnait au rez-de-chaussé.
« Papa ? » appela-t-il, plein d'espoir et de crainte.
Aucune réponse ne lui vint, et à nouveau protégé par l'ombre de la couverture, il s'avança pas à pas jusqu'au sommet de la rampe.
« Y a quelqu'un ? »
Un choc sourd ébranla la porte, le faisant sursauter.
« Qui est là ? » lança-t-il d'une voix mal assurée.
Deux nouveaux coups.
Le souffle court, Schaali contemplait la porte, indécis et effrayé.
Les coups reprirent, encore et encore, ébranlant le chambranle.
Poussant un petit cri terrifié, il se précipita dans sa chambre avec l'intention de s'y cacher, mais alors qu'il se blottissait dans l'obscurité rassurante du dessous de son lit, les coups cessèrent, remplacés par un silence glaçant.
Après de longues minutes, Schaali osa ressortir de sa cachette, s'avançant pas à pas dans le couloir.
Pas un son, pas un mouvement.
Presque rassuré, il s'avança jusqu'à la fenêtre qui dominait la porte d'entrée, et en ouvrit lentement le store pour regarder dehors.
Il faisait trop jour, et il n'y voyait pas à dix pas.
Il allait refermer le store lorsqu'un cri atroce retentit dans l'escalier, à trois pas de lui.
Criant au moins aussi fort que l'abomination qui le menaçait, ses immondes appendices livides tendus vers lui, Schaali recula jusqu'au mur, serrant sa couverture autour de lui comme si elle pouvait lui être d'une quelconque protection, avant de tenter de fuir en crabe vers sa chambre, son sanctuaire.
Le monstre rugit encore, fouillant avec une joie fébrile dans les innombrables replis de sa peau pendante pour en extirper un objet qu'il braqua droit sur lui.
Transi de peur, Schaali fixa le long cylindre de métal, tentant de comprendre ce qu'il se passait, malgré la lumière éblouissante qu'émettait ce dernier, alors que les pas lourds d'autres monstres montaient à l'étage.
Soudain, il n'y eut plus un mais trois monstres, rugissants, louvoyant dans sa direction, lui coupant toute retraite, visiblement prêts à le dévorer.
Que pouvait-il faire ? Il n'était qu'un enfant. Il n'était pas armé, ni méchant d'ailleurs.
Se jetant à terre, il implora les répugnantes créatures de l'épargner, les suppliant, encore et encore, il n'était qu'un enfant. Pitié !
Ses suppliques ne firent qu'exciter encore plus les monstres, et soudain, dans un grand bruit, quelque chose se ficha dans sa chair, la déchirant et lui arrachant un hurlement de douleur. Rejeté en arrière par la force du choc, la vue brouillée tant par la souffrance que la lumière, il vit comme dans un rêve la sombre silhouette familière de son père se dresser derrière les abominations, prêt à le défendre, coûte que coûte.

Lorsque la faille était apparue, quelques semaines plus tôt, James avait fait partie des volontaires pour l'exploration. Après tout, ils étaient coincés sur cette maudite île du Pacifique jusqu'à ce qu'un bateau voie leurs signaux de détresse et vienne les sauver, ce qui n'était pas arrivé au cours des trois derniers mois. Medhi et Agatha s'étaient également portés volontaires, et c'est donc équipés d'une des deux seules armes à feu qu'ils avaient, de deux lampes-torches et de quelques vivres qu'ils étaient partis.
De l'autre côté, ils avaient découvert un monde abominable, empli d'une végétation dégénérée, toute boursouflée et à l'odeur putride. Dès le début, James avait eu l'impression d'observer le reflet malade de la Terre. Lorsque sur terre il faisait jour, dans le monde-miroir, tel qu'ils l'avaient surnommé, c'était la nuit, d'un noir d'encre, l'immense lune aux reflets verts semblant ne pas du tout éclairer cette terre maudite.
Profitant des heures de jour pour explorer, ils avaient rapidement découvert que ce monde avait dû accueillir jusqu'à récemment des créatures civilisées, mais que quelle que fut la chose atroce qui avait muté la flore, ça avait fait disparaître les habitants, ne laissant que d’innommables créatures nocturnes qui les attaquaient à vue s'ils avaient le malheur de trop traîner au coucher du soleil. Les monstres semblaient toujours être là où ils les attendaient le moins, et par trois fois déjà, une de ces choses les avaient suivi jusque de l'autre côté de la brèche où, avec l'aide des autres naufragés, ils l'avaient massacrée à coups de pierres. S'ils continuaient à venir ici, c'était uniquement par ce qu'en dépit de la dangerosité du voyage - la main arrachée de Medhi pouvait en témoigner -, ce monde était empli de ressources utiles laissées par les précédents habitants, qui maintenant qu'il y pensait, avait dû être dévorés jusqu'au dernier par les abominations.
Tout à ses pensées, et rassuré par la présence dans la pièce de Thomas, qui avait remplacé le Tunisien après son accident, il ne s'était concentré que sur leur recherche d'objets utiles dans la maison dont ils venaient de défoncer la porte. Aussi fut-il pris par surprise lorsque Agatha se mit à hurler de terreur à l'étage, ses cris presque couverts par les sifflements suraigus et caractéristiques d'une abomination.
Lâchant la boîte qu'il allait examiner, il se précipita à l'étage, Thomas sur ses talons.
Agatha avait sorti sa lampe-torche, espérant sans doute éblouir le monstre - au demeurant plutôt petit - un instant ou deux.
Ce dernier leur jeta un regard mauvais de ses sept yeux difformes, serrant contre lui un vaste pan d'une substance membraneuse à l'aspect vaguement gluant puis avec un grondement mauvais, se laissa choir en avant sur ses nombreuses pattes chitineuses, prêt à leur bondir à la gorge, un concert de sifflements et de grincements extatiques s'échappant de lui.
Thomas, qui avait leur seule arme, tira au jugé, blessant l'abomination en plein torse. La chose se cabra, hurlant de rage, tentant de les déchiqueter de ses trop nombreuses pattes griffues, avant de retomber en arrière, inerte. Ils allaient s'en sortir. La chose avait dû profiter des stores baissés pour se cacher dans l'ombre de la maison. Ils n'avaient qu'à l'abattre et à rester bien dans la lumière, et tout irait bien. Tout irait... pourquoi faisait-il soudain plus sombre ?
Se retournant, James découvrit un instant trop tard une autre abominations, deux fois plus grande.
L'instant d'après, son corps sans vie heurtait le mur opposé.


Son patron l'avait retenu presque toute la journée, et il n'avait pu rentrer que bien après le zénith.
Il avait su que quelque chose clochait avant même d'arriver devant chez lui.
Schaali avait une peur bleue de la lumière et il n'aurait jamais laissé la moitié des volets ouverts. En découvrant la porte grande ouverte, le battant arraché de ses gonds, ses cœurs s'étaient arrêtés. Le hurlement de douleur de son fils unique l'avait électrisé, et il avait bondi en avant, prêt à tout pour protéger son enfant, quelle que soit la chose qui se trouvait chez lui.
C'est parce que son enfant gisait au sol, baignant dans son propre sang, qu'Amart ne remarqua même pas la chair livide et molle, la vaste gueule baveuse et emplie de dents faites pour broyer et les longs appendices étrangement segmentés des monstres sans pitié qui attaquaient un petit sans défense. Il ne réalisa qu'il avait vaincu l’innommable que lorsque les trois aberrations se retrouvèrent gisant au sol, enfin silencieuses et immobiles.
Il avait vu l’indicible, et avait sauvé son fils.
Tout irait bien.
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TiTonoff
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Re: Prompt-o-maton

Message par TiTonoff »

Le comtpable dyslexique exécuta sont contrat...
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Chimel
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Re: Prompt-o-maton

Message par Chimel »

Vraiment cool ce concept! Bravo!
En essayant continuellement on finit par réussir. Donc, plus ça rate, plus on a de chance que ça marche
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atlantisdesetoiles
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Re: Prompt-o-maton

Message par atlantisdesetoiles »

Bon vacance oblige, j'ai mis un peu de temps à écrire celui là.

Le comtpable dyslexique exécute son contrat...

Je précise n'avoir fait aucune recherche géographique, les rues sont donc totalement bidon.

Frénétiquement, Renaud tente d'enfiler sa clé dans la serrure du modeste pavillon beige qu'il occupe avec sa femme et ses deux filles au 12, avenue Keuring. Crissant contre le métal du cylindre, la clé s'obstine à rater encore et encore la fente.
Se mordant les lèvres presque au sang, il se concentre de toutes ses forces, ignorant la sueur qui lui coule dans les yeux, et parvient enfin à contrôler ses tremblements juste assez pour pouvoir ouvrir sa porte d'un geste brusque. Jetant son attaché-case sur l'escalier, il se surprend un instant à espérer entendre la course bruyante de Charlotte qui déboulerait de sa chambre pour lui sauter au cou. Seuls le silence de sa demeure et les aboiements diffus et insupportables du chihuahua des Müller, au 14 de l'avenue, lui répondent.
Passant une main moite sur son crâne prématurément dégarni par le stress, le quadragénaire réfléchit. La voix a été claire. Il a jusqu'à quinze heures. Après il sera trop tard. Il faut qu'il se concentre, la vie de Laura et de ses filles en dépend.
Tout d'abord, trouver une arme.
Fonçant à la cuisine, il ouvre les tiroirs, en sort un couteau à steak, puis le grand hachoir, hésitant.
Non, il ne se sent pas capable de le faire ainsi. Défaisant sa cravate à gestes rageurs, l'arrachant presque, il part en courant dans le garage, renversant au passage la petite desserte que Laura avait hérité de sa grand-mère adorée. Le délicat plateau de verre se brise en mille morceaux, sans qu'il ne s'arrête une seule seconde.
Se précipitant vers la grande armoire métallique dans laquelle ils rangent tout le matériel dangereux de bricolage ou de jardinage, Renaud jure. Le cadenas. Ils ont posé un cadenas l'été précédent, après avoir découvert les filles jouant avec la faucille dans les hortensias.
Retirant sa veste de costard, s'emmêlant dans les manches au point d'en déchirer une, il repart en sens inverse.
Jetant une à une toutes les clés accrochées près de la porte, il jure, une fois encore. Sa montre lui apprend l'horreur de la situation. Treize heure douze, déjà.
Où est cette putain de clef ?!
A grands pas, il retourne à la cuisine, arrachant le tiroir à objets divers pour le renverser sur le plan de travail, fouillant frénétiquement entre les élastiques et les vieux billets de cinéma, sans plus de succès.
Bon Dieu, où est cette putain de clef ?!
Une intuition le saisit soudain, et il court jusqu'au garage, manquant de glisser sur les éclats de verre de la table brisée.
Là, dans la poche de la veste de jardinage de Laura. La clé !
A nouveau, impossible de la faire entrer dans la serrure, ni dans un sens ni dans l'autre.
Terrifié, désespéré, et perdu, Renaud la jette par la porte ouverte, loin, dehors, quelque part dans l'herbe qu'il n'a pas tondue depuis deux semaines, pour regretter immédiatement son geste.
Un regard alentour et il entrevoit une solution.
L'ensemble de ski de luxe Lacroix que Laura lui a offert à Noël. Il n'a pu l'utiliser qu'une seule fois, et les skis avec leurs chaussures coûtent presque à eux seuls un mois de salaire.
Après une hésitation, il se saisit d'une chaussure et l'abat de toutes ses forces sur le cadenas, encore et encore. La coque monogrammée se fissure dans un craquement, puis les attaches argentées de la chaussures s'arrachent. Ses bras lui font mal, sa sueur l'aveugle. Enfin, le cadenas cède brusquement.
Jetant l’accessoire défoncé, il ouvre la porte, renversant à moitié le contenu de l'armoire.
La tronçonneuse ? Trop bruyant, trop salissant.
La bêche ? Stupide.
Le désherbant ? Trop lent.
Finalement, il se décide, et saisissant la petite hache à bois, fixe l'outil encore presque neuf, qui repose, lourd et menaçant dans ses mains.
Treize heure vingt.
Qu'avait dit la voix ?
Qu'elle lui avait laissé un message, à l'étage.
Il s'y précipite, ses chaussures de ville couinant dans l'escalier en faux marbre.
Rien dans la chambre d'Anelise, ni dans la chambre d'amis, pas plus que dans la salle de bains.
Avec appréhension, il ouvre la porte de leur chambre. Et si c'était les doigts de sa petite Charlotte, ou une oreille d'Anelise ?
Retenant son souffle, Renaud lève les yeux sur la coiffeuse de Laura, avec sa collection d'échantillons de parfums, et leur vieille armoire qui se dresse un peu de guingois. Sa table de nuit, sur laquelle il a encore laissé traîner un vieux mouchoir, bien qu'il sache combien ça exaspère son épouse. Et son regard se fige, glacé.
Sur leur lit, parfaitement au milieu, un énorme ours en peluche en polyester, de ceux qu'on gagne dans les fêtes foraines, le fixe, sa tête arrachée posée entre ses pattes.
Sur le torse de l'ours, brodé de manière malhabile en gros fil rouge qui jure avec la fourrure bleu pâle de ce dernier, un mot.
Nappier.
Le nom de sa cible. Le nom de la personne qu'il doit tuer s'il veut sauver sa famille. Le nom de la vie qu'il va échanger contre celle des siens.
Il ne connaît personne de ce nom-là.
Treize heure trente.
Le portable d'Anelise est plus rapide que leur vieille tour, mais il n'est nulle part en vue dans sa chambre. Ni dans ses tiroirs qu'il jette au sol, ni dans son bureau, donc il fait s'effondrer les piles de cahiers.
Bien sûr, l'exposé sur Babylone. Elle l'a exceptionnellement pris à l'école.
Treize heure quarante.
Jurant, Renaud se rue au rez-de-chaussée, écrasant presque le bouton de la vieille tour grise.
Les mains agitées de tics nerveux, il regarde l'écran noir afficher la petite fenêtre de couleur. Démarre, maudit ordinateur ! Démarre.
« Mise à jour en cours, veuillez patienter, l'opération peut durer quelques minutes. »
Non ! Pas maintenant !
« Mise à jour, 2% »
Treize heure cinquante-quatre, son cœur va exploser et enfin, le bureau s'affiche.
Google.
Mabbier.
Un million deux cents dix-huit mille résultats.
Il doit être dans la région.
Branfe.
France, pas Branfe !
A la sixième tentative, il parvient enfin à écrire le mot correctement.
Trois mille six cent vingt-deux résultats.
Plus précis. Il lui reste à peine une heure.
Bjino.
Non !
Idjon
NON !
Dijon !
Dijon !
Quatre cent quatre résultats, la plupart parlant d'un pédiatre dont le cabinet est au sud de la ville.
Faites que ce soit lui !
Huit post-it et une langue mordue plus tard, il a enfin écrit son adresse.
Le clocher de l'église au bas de la rue sonne quatorze heure.
Abandonnant l'ordinateur, Renaud se rue à nouveau au volant de sa Peugeot, enfonçant si vite les gaz que la mécanique, un peu vieille, cale.
Hurlant, frappant sur le volant, il parvient finalement à la faire démarrer. Mordant sur le gazon, il fonce, traversant le quartier résidentiel bien trop vite.
Quatorze heure dix-sept, et ça n'avance pas.
Une bétonnière manœuvre laborieusement sur la route, et il ne peut pas la contourner.
BOUGE-TOI, CONNARD !
L'ouvrier lui fait un doigt d'honneur et le chauffeur met encore plus de soin à ralentir.
Quatorze heure vingt et un.
Il a perdu quatre minutes.
Tant pis, il faut qu'il accélère. Grillant un feu rouge, il enfonce la pédale. Cinquante, soixante, soixante-dix kilomètres-heure, en plein centre.
La vie de sa famille en dépend.
Quatorze heure trente-neuf. Quartier chic, immeuble Belle Epoque et balcon en fer forgé.
Abandonnant à moitié sa voiture sur le trottoir, Renaud se rue au numéro 5.
Une étude d'avocats, un dentiste et un centre de remise en forme, mais pas de pédiatre, pourtant c'est la bonne adresse.
C'est la bonne adresse ?
Non, espèce de débile ! Le Dr Mabbier est au 3, pas au 5. Au 3 !
Deux portes plus loin, il déchiffre les plaques frénétiquement.
Trois gynécologues, un endocrinologue, deux généralistes et un pédiatre.
Au sixième étage.
Le grand hall marbré est glissant, et il dérape devant la porte en fer forgé de l'ascenseur. Le bouton s'illumine et avec un bruit grinçant, l'antique cabine se met en marche, très loin au dessus de lui.
Quatorze heure quarante-quatre.
Plus que seize minutes.
Il n'a pas le temps.
Grimpant les marches quatre à quatre, il s'élance dans le vaste escalier qui s'enroule, languide, autour de son cousin mécanique.
Son cœur va exploser et ses poumons sont trop petits, mais enfin, le sixième étage.
Il s'arrête derrière la porte en chêne sculpté.
Derrière, des rires d'enfants.
Quatorze heure cinquante-deux.
Renaud ferme les yeux, il n'a pas le choix. Il se concentre sur le rire de ses filles. Oui, c'est ça. Il les entend presque et des larmes lui brûlent les yeux.
C'est un pédiatre. Ses patients sont petits. Ils oublieront.
Tout ira bien et il pourra serrer Anelise et Charlotte contre lui ce soir.
Il pousse la porte, faisant retentir un carillon automatique.
Une charmante secrétaire brune lève le nez de son ordinateur.
« Monsieur ? Tout va bien ? »
« Où est le docteur ? »
« Dans son bureau, Monsieur, mais il est en consultation. Je peux vous aider ? » demande-t-elle, inquiète.
« Où est le bureau ? »
«  A gauche Monsieur, mais vous ne pouvez pas y aller ! » proteste la femme, se relevant pour le poursuivre alors qu'il fonce vers la grande porte blanche.
Sa main est tellement moite qu'elle glisse sur le bouton en cuivre.
Soudain le battant s'ouvre sur un homme, la soixantaine, l'air doux, une paire de lunettes perchée au bout de son nez.
« Dr Mabbier ? »
« Oui, c'est moi. Tout va bien monsieur ? »
Sans répondre, il le pousse à l'intérieur, sous le regard horrifié d'une mère, un bébé très rouge sur les genoux.
Il est petit, tant mieux, il ne se souviendra de rien.
« Odile, appelez la police ! » crie le médecin à sa secrétaire, qui repart en courant en sens inverse.
Il ne faut pas qu'il hésite. Lever la hache, l'abattre, et tout sera fini.
La hache !
Il l'a laissée au pied de l'ordinateur, là où il l'avait posée.
Il scanne la pièce fiévreusement.
Un gros presse-papier en pierre représentant une colombe dodue.
Il se jette dessus.
La femme hurle et se précipite dehors, alors que le médecin, les mains levées, l'air sincèrement inquiet, essaie de l'apaiser.
Il abat son bras, droit sur ces yeux trop doux, trop gentils. Encore et encore.
Quelque chose lui obscurcit la vue, quelque chose de chaud et de poisseux, mais il continue jusqu'à ce que le presse-papier lui échappe des mains.
Quatorze heure cinquante-huit.
Fébrile, il sort son téléphone, et avisant la plaque du médecin, la pose sur la blouse qui n'est plus du tout blanche, puis prend une photo.
Quatorze heure cinquante-neuf.
Il fixe le petit rond de chargement. Message envoyé.
Quinze heures.
Il a réussi.
Il sursaute alors que son téléphone sonne.
Il tremble tellement qu'il manque de le lâcher.
Une voix, froide, synthétique, de l'autre côté.
« Vous avez échoué, Mr Tellier. Un dernier mot à votre famille ? »
Il hurle, il supplie. Il entend Charlotte qui pleure, puis une détonation.
Deux.
Trois.
Le silence, puis la voix.
« Quel dommage, Mr Tellier. Vous auriez dû tuer Mr Nappier, de Nappier & Co, et pas ce médecin » ricana-t-elle une dernière fois.
Le silence et, dans le lointain, les sirènes de police.
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TiTonoff
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Re: Prompt-o-maton

Message par TiTonoff »

Salut,
merci pour ce moment de lecture.
J’ai apprécié l'histoire et tu l'écrit bien.

Bon été et attention aux canicules...

See ya TiTonoff
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atlantisdesetoiles
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Re: Prompt-o-maton

Message par atlantisdesetoiles »

Merci.Ce sont des défis stimulants pour moi.
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